Les mesures pour améliorer la maîtrise de la langue française en classe sont-elles sèches ou archi sèches?

Lettre aux parents, lettre aux enseignants, article au Devoir et communiqué de la FSE… la communication de la rentrée à propos des mesures du MELS pour améliorer la maîtrise de la langue française en classe me semble un peu brouillonne. La question de l’autonomie professionnelle des enseignants risque de prendre beaucoup de place dans les discussions si Mme Courchesne ne réagit pas en début de semaine. Je prends l’attitude du prof masqué à témoin pour illustrer mon propos:

«N’en déplaise à la ministre, je n’ai pas envie de corriger de la schnoute, de faire des dictées avec des explications que la moitié de mes groupes ne comprendront pas. Aller en classe quand tu ne comprends rien et que tu ne peux rien apprendre, ça démotive. Apprendre, c’est stimulant quand on comprend. Encore faut-il avoir les connaissances nécessaires. C’est là que j’en suis rendu avec eux. Malgré la lettre de la ministre, je fais ce qui me semble nécessaire pour la réussite des jeunes qui me sont confiés. C’est ce que j’appelle de l’autonomie professionnelle.»

Pourtant, tout le monde s’entend pour que la maîtrise de la langue française occupe une grande place dans nos écoles. Ou c’est parce qu’on ne trouve plus «Les mots pour (ne plus) le dire» ou bien, il y a une subtilité qui nous échappe, mais le message risque de déraper. Clairandrée Cauchy me paraît bien rapporter la situation:

«Les indications précises sur l’enseignement du français fournies aux parents, notamment quant à la tenue d’une plage-horaire quotidienne réservée à la lecture à l’école, à la rédaction d’un texte par semaine ainsi qu’à l’administration de dictées, tranchent avec le ton de la lettre adressée aux enseignants. Ces «nouvelles initiatives», comme les décrit la ministre dans sa lettre aux parents, ne font cependant pas l’objet d’une description précise dans la lettre adressée aux enseignants.»

Que faire quand on est directeur d’école, maintenant? Combien de parents (ou d’élèves) vont se présenter à l’école avec la lettre de la ministre à la main? Quoi dire aux enseignants pour ne pas contrevenir à l’esprit du nouveau programme? Comment concilier tout cela avec la volonté politique exprimée par la ministre? Et enfin, comment réagir avec le syndicat qui voudra sûrement s’affirmer sur le flanc de l’autonomie professionnelle dans cette période où en tant que leader pédagogique on veut exercer une certaine influence dans le choix de certaines stratégies pédagogique à privilégier?

Pas facile la vie de directeur d’école quand passe ce genre de lettres au-dessus de ta tête. Pourtant, Mme Courchesne était animée des meilleures intentions du monde, j’en suis certain. Dommage…

Qui sait, aura-t-on une lettre pour les directions d’école cette semaine!

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5 Commentaires
  1. michel le neuf 14 années Il y a

    Si on fait juste se reculer de trois pas, on se rend compte que la lettre de la ministre s’inscrit dans une logique de recentralisation qui semble bien sur les rails. Relis le projet de loi 88: non seulement la LIP pourrait désormais permettre à la ministre de dire aux commissions scolaires quoi faire, mais elle pourra également s’adresser directement aux écoles !!! Et rien de cela ne semble vouloir changer si je me fie aux amendements qui ont été retenus suite à l’étude du projet en commission parlementaire.
    Maintenant, je me pose une question. Et pour le moment, je suis sans réponse: est-ce que notre ministre et son gouvernement se servent de la politique pour faire de l’éducation ou est-ce qu’on se sert de l’éducation pour faire de la politique ? Franchement, je ne sais pas. Mais je suis un des rares de ma profession à croire qu’il faut encore donner la chance à Mme Courchesne !
    Relis les deux lettres de la ministre. Au lieu de déchirer nos chemises et de se couvrir la tête de cendres, si on reconnaissait là un effort pour rebâtir la confiance de la population vis à vis son système public d’éducation ? Parce que dans la tête du commun des mortels, c’est où dans le système qu’on a continué à donner des dictées, à insister sur la grammaire et l’orthographe et ne pas tolérer les gestes violents? Ben, dans la tête du commun des mortels, c’est dans les écoles privées. Je sais, c’est juste une question de perceptions. Mais des perceptions durables et dommageables pour l’école publique.
    Malheureusement, le système public, dans la tête des gens, ne sera jamais meilleur que la pire de ses écoles alors qu’au privé, toutes les écoles ont l’air aussi bonnes que la meilleure d’entre elles. J’arrête ça là, tu sais que je suis intarissable là-dessus.

  2. Photo du profil de Mario Asselin
    Mario Asselin 14 années Il y a

    Comme je l’ai écrit en fin de billet Michel, «Mme Courchesne est animée des meilleures intentions du monde», je n’en doute pas. Tu ajoutes une motivation bien légitime que celle de vouloir «rebâtir la confiance de la population vis à vis son système public d’éducation».
    Je dis simplement que de la façon dont elle s’y est pris, elle complique singulièrement la vie des directions d’école qui ne l’ont déjà pas facile…

  3. Photo du profil de LucPapineau
    LucPapineau 14 années Il y a

    Et celles des profs…

  4. Photo du profil de AndreChartrand
    AndreChartrand 14 années Il y a

    Bonsoir Mario,
    « Quoi dire aux enseignants pour ne pas contrevenir à l’esprit du nouveau programme? »
    Faut-il comprendre que les mesures questionnées sont anti réforme?

  5. Photo du profil de Mario Asselin
    Mario Asselin 14 années Il y a

    «Faut-il comprendre que les mesures questionnées sont anti réforme?»
    Je ne crois pas. Elles peuvent facilement s’intégrer, même par les plus puristes partisans de la réforme.
    De fait, je crois qu’il est possible de «gérer» ces mesures dans l’esprit de la réforme autant qu’il est possible de prétendre le faire en étant anti-réforme. Tout dépend de l’interprétation qu’on donne à ce qui doit être fait en classe.
    L’utilisation de la dictée (par exemple) peut devenir «bête et méchante» (et le texte du prof masqué soulève bien ce point) à certains égards. Même l’heure de lecture et la situation d’écriture (par semaine) peuvent se concevoir autant dans les paradigmes des l’apprentissage et de l’enseignement… Comment interpréter la réaction de cette universitaire qui a beaucoup lutté contre la réforme et qui n’est pas plus satisfaite de ce qui se passe en ce moment?
    Pour Mme Courchesne, je crois que les concepts «réforme» et «anti-réforme» n’existent plus et c’est probablement une bonne chose. Reste le nouveau programme de formation et les mesures peuvent très bien cadrer avec son application, mais on s’entend que certains profs peuvent vouloir les appliquer en dehors de l’esprit de ce dernier… Que faire? Que dire? à ce moment, en tant que leader pédagogique…
    J’aimerais bien avoir l’avis des autres sur ce point…

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