Enquête NETendances 2008: plafonnement et rupture

J’ai assisté ce matin à la rencontre de presse dévoilant les résultats de l’Enquête NETendances 2008 qui a été réalisée au téléphone auprès de plus de 12 150 répondants adultes au cours de 2008. Najoua Kooli (du CEFRIO) et Philippe Le Roux (de l’agence Internet VDL2) nous ont présenté les faits saillants dans une salle du Palais des Congrès de Montréal. Quelques blogueurs et journalistes étaient présents, ce qui a agrémenté plusieurs échanges sur l’essentiel de ce qu’il y avait à retenir des chiffres présentés. En direct ce matin, j’ai bien dû composer une bonne vingtaine de messages sur mon canal Twitter et ce n’est qu’au terme d’une journée de rendez-vous à Montréal que j’écris ce billet. Les résultats ne sont pas si faciles que ça à décoder…
NETendances_2008.jpg
Cliquez pour le lien vers les résultats de l’enquête

Le graphique ci-haut montre bien que l’utilisation d’Internet plafonne. Si les Québécois recherchent encore plus d’information par ce moyen, y font davantage de transactions et communiquent plus souvent de cette façon, ils consultent moins les blogues (19% vs 26%) et écrivent moins sur leur blogue personnel (5,5% vs 8,3%). Le sondage révèle aussi que 75% des adultes au Québec détiennent des appareils mobiles (56% des adultes du Québec possèdent un cellulaire, 37% sont propriétaires d’un lecteur mp3 et 8% disposent d’un assistant numérique [BlackBerry ou Palm] ou d’un téléphone « intelligent » [iPhone]). On peut donc affirmer que les Québécois sont «équipés pour se connecter sans contrainte de fil sur Internet. D’ailleurs, il semble que «des 4,4 millions d’adultes qui sillonnent régulièrement le Web, 1,7 million y accèdent en toute mobilité».

Bien sûr, j’ai été frappé par quelques statistiques, en particulier:

  • Communiquer par courriel (63%), planifier leurs vacances (39%), chercher des renseignements médicaux ou liés à la santé (36%), écouter ou télécharger de la musique (24%), regarder des photos (23%), visionner ou télécharger des vidéos (21%), et enfin, participer à des jeux en ligne (15%) semblent mobiliser les internautes du Québec.
  • En 2008, 31,0% des 18 à 34 ans ont consulté des blogues (comparativement à 19,3% de tous les adultes) et 9,2% ont écrit sur des blogues (comparativement à 5,5% de tous les adultes); 50,3% de jeunes de 18 à 34 ans fréquentent des sites de réseautage, contre 22,9% pour l’ensemble des adultes.
  • Le Web arrive au troisième rang avec 13% parmi les principales sources d’information des Québécois en matière d’actualités, tout juste derrière la presse écrite (15%), mais devant la radio (7,5%); la télévision (63%) est loin devant. «Toutefois, tout porte à croire que ce phénomène s’accentuera au cours des prochaines années, puisque 24% des jeunes Québécois de 18 à 34 ans ont déjà adopté le Web pour s’informer sur l’actualité et sur les nouvelles.»
  • 2% des adultes québécois contribuent à des wikis… et c’est en hausse comme pourcentage de contribution par rapport à l’an dernier où ce pourcentage était «anecdotique»…

Au terme de ma relecture de plusieurs documents, je vois venir encore plus clairement une rupture entre les usages des internautes et le comportement des institutions au niveau de leur communication. Les statistiques de l’échantillon «18-34 ans» risquent de montrer des chiffres encore moins spectaculaires que ceux des jeunes de moins de 18 ans; si la situation actuelle (qui excluent des résultats les moins de 18 ans) ne montre pas encore cette rupture, il faut prendre acte qu’elle risque d’arriver rapidement. Chez Rue Frontenac, le journaliste qui a couvert le sujet de l’enquête NETendances parle de «recul du Web 2.0» et, littéralement, les chiffres lui donnent raison. Je suis assez d’accord avec le commentaire de Mme Kooli qui «ne considère pas qu’il s’agit d’un véritable recul». Se fier sur les chiffres d’aujourd’hui pour légitimer, au niveau des institutions, les seuls modes actuels de communication me paraît être une idée comportant une grande part de risque!

N.B. Parmi les autres textes qui découlent du dévoilement des résultats, il y a celui du Devoir qui traite de «la baisse de popularité» de la blogosphère. Le commentaire de Stéphane Gauvin est à noter: «Cela ne correspond pas vraiment à ce que l’on constate ailleurs dans le monde. La consommation de contenus issus du Web participatif est en très forte progression un peu partout sur la planète. Les jeunes y sont aussi très sensibles».

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3 Commentaires
  1. Photo du profil de PatriciaTessier
    PatriciaTessier 13 années Il y a

    Le fait de faire ce type de sondage au téléphone donne un biais non négligeable aux résultats. Est-ce que celui-ci a été pris en considération?
    Deux raisons bien précises. Tout d’abord beaucoup des « très branchés » n’ont plus de téléphone filaire et ça il y a des preuves, il y a d’autres études qui donnent ces résultats. Est-ce que l’étude de Léger a été ajustée pour prendre ceci en considération?
    Deuxièmement, ceux qui sont équipé d’un filaire sont possiblement moins disponibles pour répondre aux sondages. L’utilisation du web nous rendant souvent allergique au téléphone. Plus difficile à chiffrer mais pourquoi ne pas questionner un peu la méthode du sondage…
    Finalement, n’a t-on pas parlé de la non-possibilité pour certains québécois de se brancher à la haute vitesse? Encore la semaine dernière, à C.Charette, le député PQ de Matane (je crois?) disait que 50% de ses citoyens n’avaient pas accès à la haute vitesse…

  2. Photo du profil de Mario Asselin
    Mario Asselin 13 années Il y a

    Je ne sais pas trop si l’enquête a tenu compte des biais que tu décris, mais je fais partie à la fois des gens qui ne répondent à peu près plus au téléphone et aux sondages… 😉
    Pour ce qui est de l’accès à la haute vitesse, un journaliste de Radio-Canada a posé précisément cette question et il a clairement été mentionné qu’il n’y avait pas de données sur cette question. J’ai cru comprendre qu’une autre enquête à venir à l’automne pourrait peut-être identifier le nombre de Québécois n’ayant pas la possibilité de se brancher à la haute vitesse.
    Merci d’avoir apporté ces bémols Patricia.

  3. Photo du profil de JulieFortin
    JulieFortin 13 années Il y a

    Patricia (premier message ci-haut) m’interpellait un peu plus tôt via facebook sur les biais d’une telle étude. Je ne connais pas les détails de la méthodologie employée, mais je peux peut-être apporter quelques précisions méthodologiques générales…
    D’abord, il faut bien voir que dans toute étude, il y a des biais. Les sondeurs utilisent des moyens pour les contrôler, mais n’y parviennent pas parfaitement. Il faut vivre avec. Dans ton message Patricia, tu soulèves deux excellents points : le biais du mode de collecte et le biais de la non-réponse.
    Biais du mode de collecte téléphonique
    En utilisant le téléphone, on passe à côté des gens qui n’ont plus de ligne terrestre, c’est vrai. Par contre, si on utilisait Internet seulement, on passerait à côté des gens qui ne sont pas branchés – pas fort pour mesurer le taux d’utilisation d’Internet! Il y a aussi d’autres défis associés aux sondages Web, j’en parle abondamment dans le blogue de SOM.
    Biais de la non-réponse
    Les taux de réponse des sondages téléphoniques baissent constamment, tant ici au Québec qu’ailleurs au Canada et aux Etats-Unis, ce qui peut affecter la représentativité des données. Je suis d’ailleurs profondément étonnée du taux de réponse élevé de cette étude, qui va à contre-courant de toutes les tendances actuelles. Il faudrait voir de quelle façon a été calculé ce taux de réponse et comment l’échantillon a été généré.
    Pour contourner les biais, les données sont pondérées en fonction de certaines variables sociodémographiques de la population.
    Une autre façon de contourner le biais serait d’utiliser une collecte mixte (téléphone + Web).
    De plus, une nouvelle tendance – surtout aux États-Unis pour le moment – consiste à joindre les gens sur leur cellulaire (ex. : par sms) pour les inviter à remplir des sondages en ligne…
    Enfin, j’aimerais ajouter qu’il faut être prudent dans l’interprétation des données et du « recul » du Web 2.0. En effet, si on prend un exemple que souligne Mario sur les gens qui écrivent moins sur leur blogue personnel (6 % vs 8 %), on ne peut pas parler d’un recul puisque l’écart se situe dans la marge d’erreur…
    Note de Mario: J’ai ajouté le lien vers ton blogue Julie, et je vois qu’il y a aussi une catégorie «sondage Web»; l’internaute voulant en savoir plus sur ce sujet complexe, choisira… Merci pour ton apport à cette discussion.

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