Ça clique entre producteurs agricoles et restaurateurs

Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec dans la section « blogue ».

Je l’avoue bien humblement, je ne connais que très peu de choses du monde agricole. J’ai beau avoir un fils qui oeuvre dans la production porcine (chez Bernard Breton Inc., transparence oblige), j’ai une compréhension très superficielle des enjeux de ce domaine.

Néanmoins, quiconque s’intéresse à ce que j’écris depuis 2002 sur des blogues sait que les changements apportés par l’utilisation du numérique me captivent énormément.

Dans le passé, je me suis intéressé aux combats menés par l’ADISQ pour réglementer l’industrie dans laquelle ce groupe évolue. Depuis ce moment où chacun a été soumis aux nouveaux mécanismes de production, de reproduction et de distribution de la musique, rendue possible par les avancées technologiques qui ne cessent de survenir, la remise en question du modèle d’affaires «du marché» de la musique est présente et je suis fasciné autant par les résistances de certains que par les opportunités saisies par d’autres.

Dans un plus récent billet, j’ai évoqué comment le domaine du livre était lui également bousculé par la montée du commerce électronique et le virage numérique.

Je suis tout autant impressionné par la façon dont les grands groupes médias cherchent à adapter leur modèle d’affaires devant l’accès à l’information de plus en plus prisé par les gens via Internet et les médias sociaux. Enfin, je ne parle même pas des répercussions en éducation de l’usage des nouvelles technologies, dont on sait jusqu’à quel point elles me captivent…

Généralement, les usages du numérique dans un marché coupe des intermédiaires entre des consommateurs et des fournisseurs. À tout le moins, le rôle joué par certains intermédiaires exige des ajustements.

Je me suis récemment demandé si le même phénomène bousculait l’agriculture et la restauration et j’ai découvert en fréquentant les entrepreneurs de la récente tournée dont j’ai parlé à deux reprises (1, 2) qu’un nouveau startup venait doucement prendre sa place dans la relation entre un chef restaurateur et un producteur agricole. Il s’agit de Provender, fondé en 2013 par Jeff Aldrich, Kyra Kristof et Caithrin Rintoul.

Cette devise me semble bien situer la philosophie qui guide l’entreprise qui cherche à se donner une place prépondérante dans le domaine du commerce de détail et de l’alimentation…

«Celui qui livre à la porte arrière d’un restaurant détermine qui entre par la porte d’en avant.»

En ayant aménagé sur Internet une «espace-marché» qui relie directement des fournisseurs agricoles et des gens qui cherchent à se procurer des aliments de grande qualité pour la restauration ou autre, Provender permet aux produits de la ferme de se rendre jusqu’à la fourchette de ceux qui fréquentent les restaurants avec beaucoup moins d’intermédiaires.

Accompagné par mon fils de chez Bernard Breton et deux intervenants de chez Provender, je me suis rendu récemment chez deux producteurs agricoles de la région Chaudière-Appalaches pour constater de visu l’intérêt d’un tel dispositif pour faire du commerce.

À la ferme Le Porc de Beaurivage (St-Patrice), Carole Marcoux et Christian Lefebvre produisent des porcelets qui sont laissés avec leur mère plus longtemps que dans d’autres fermes d’élevage. Affichant déjà certains produits sur le Web dans le but d’en stimuler la vente directe, bien sûr que le modèle d’affaires proposé par Provender suscite de l’intérêt.

Dans le contexte où Provender a réussi à aller chercher du financement pour accélérer sa croissance et dans celui où la région de Québec à partir du mois d’octobre est dans la mire de Caithrin Rintoul et de ses partenaires, les prochains contacts entre la ferme et l’équipe de Provender devraient nous en dire davantage. Les producteurs étaient très enthousiastes à l’idée de pouvoir offrir plus facilement leur porc de grande qualité aux Québécois. Tout comme chez Bernard Breton, la très grande proportion de leur production est habituellement écoulée sur les marchés d’exportation, au Japon entre autres. «Les Québécois ne connaissent souvent pas notre porc et pouvoir le leur offrir dans leur assiette serait pour nous un très grand accomplissement», avouent Carole et Christian, qui verraient d’un bon oeil le nom de leur ferme (et de leur porcelet de lait) sur le menu d’un bon restaurant de la région.

Du côté de Michel Thériault et de Valérie Fortin de chez Poulet Fermier (St-Apollinaire), le développement d’un marché de proximité fait déjà partie de leurs objectifs d’affaires. Depuis quelques temps, ils «font du commerce» par l’entremise de la plateforme d’un «OBNL qui offre un accès direct à des aliments produits localement», ce qui leur permet de mieux comprendre l’importance de rapprocher les producteurs, des gens qui mangent…

L’augmentation des profits tirés de l’exploitation d’une ferme fait partie des enjeux mis sur la table par Provender autant que l’amélioration de la communication entre le chef d’un restaurant et le fermier.

Il faut voir le sérieux avec lequel chaque partenaire de Provender est mis en valeur dans la plateforme. Ce marché en ligne qui émerge doucement sera à surveiller dans les prochains mois. Jusqu’à quel point il évolue actuellement sous les radars du secteur traditionnel et des lobbys, il faudra voir…

Probablement impressionné par ma méconnaissance du milieu agricole, je me suis dit au terme de ces visites de ferme qu’il me faudrait – comme bien des Québécois – m’intéresser davantage à la traçabilité de ce qui se retrouve dans mon assiette.

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