En éducation, des syndicats et des ministres ont beaucoup nui

Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec dans la section « blogue ».

En début de semaine, le président du Conseil supérieur de l’éducation (CSE), M. Claude Lessard, a rendu public le Rapport sur l’état et les besoins de l’éducation 2012-2014. Je viens d’en terminer la lecture.

D’une utilité certaine, le document de 120 pages (ou le sommaire) traite de ce qui a pu nuire ou aider ces quinze dernière années à l’implantation de la reforme du curriculum et des programmes d’études. L’examen du contexte politique, l’analyse des points de vue d’acteurs scolaires et certains constats du Conseil permettent autant de sévères critiques que des recommandations légitimes pour la suite des choses.

Dans ce qui suit, j’ajoute mes propres conclusions basées sur mes expériences personnelles puisque j’ai tout de même été un témoin privilégié de ces années de tentatives de réformer l’éducation au Québec ayant été directeur d’une des seize écoles ciblées, à l’époque, pour l’expérimentation et la validation du nouveau programme de formation de l’école québécoise.

Les syndicats boycottent

«Dès le début de l’implantation du Programme de formation de l’école québécoise, les syndicats enseignants ont décrété un boycottage des activités de formation» (page 71 du Rapport du CSE).

Je me souviens même d’une période au début des années 2000 où des processions de syndiqués étaient organisées. Programme de formation encore dans l’enveloppe de cellophane, les syndiqués avaient la directive de le jeter aux ordures. Comment voulez-vous expérimenter sérieusement dans ces conditions?

Pas étonnant qu’en 2003, les syndicats proposent un moratoire.

Encore aujourd’hui, malgré que l’approche par compétences des programmes de la France, de la Belgique francophone et de la Suisse romande soit de mise, certains syndicats résistent encore avec vigueur à ce qui fait de plus en plus consensus.

Des ministres de l’Éducation nuisent
Neuf ministres et quatre gouvernements ont piloté l’implantation de la réforme… Dans plusieurs cas, des ministres de l’Éducation ont fait partie des problèmes plutôt que des solutions :
– L’abandon sous Pierre Reid du projet de création d’un Ordre professionnel pour les enseignantes et les enseignants pourtant au programme du Parti libéral en 2004 a largement compromis la nécessaire amélioration de la formation continue des enseignants et du rehaussement de leur statut à celui de professionnels.
– La politique de Sylvain Simard «un élève, un manuel, une matière» de 2005 a complètement tué dans l’oeuf la nécessaire prise de recul des enseignants face aux différents manuels scolaires pour qu’ils se réfèrent d’abord au programme de formation.
– En rebaptisant la réforme issue des États généraux de l’éducation de 1998 le «renouveau pédagogique», Jean-Marc Fournier a nui à son implantation en laissant croire que les enseignants n’étaient plus autonomes dans le choix de leurs stratégies pédagogiques…

«Il a consacré le détournement de la réforme du curriculum et des programmes vers la pédagogie» (page 62 du Rapport du CSE).

– Pour sa part, Michelle Courchesne a eu à gérer certaines controverses ou critiques, comme le bulletin sans pourcentage ou le redoublement et ses « solutions» ont souvent été malheureuses…

«On ne sait pas trop ce qu’elle voulait faire. Voulait-elle corriger certaines erreurs ? Peut-être, mais elle l’a en même temps désavouée [la réforme] (source).»

Je vais m’abstenir de commenter sur le ministre actuellement en poste qui «fait plus que sa part» pour nuire; j’en ai suffisamment parlé en 2014.

De nouvelles orientations
Ne souhaitant pas rester sur cette note négative puisque le rapport du CSE contient également du positif, je rappellerai les trois orientations proposées pour «éclairer» les suites à donner :

  • Se réapproprier collectivement les fondements du curriculum et des programmes d’études en se souciant de leur applicabilité.
  • Sortir de certaines impasses qui paralysent les dossiers à caractères éducatif
  • Adopter une approche graduelle et itérative au regard de l’élaboration et de la mise en oeuvre du curriculum et des programmes d’études.

Je ne désespère pas de retrouver en 2015 plus de gestes concrets des syndicats et du ministre pour que les directions d’école et les milieux locaux aient plus de pouvoir sur l’éducation. Le Conseil sur cette question est très clair…

«Le leadership pédagogique des directions d’établissement demeure difficile à exercer. Toutefois, là où il est bien présent, il constitue un facteur indéniable de succès de la mise en oeuvre des réformes.» (page 3 du Rapport sommaire du CSE)

Souhaitons que ce Rapport circule le plus possible.

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1 Commentaire
  1. […] supérieur de l’éducation (CSE) sur l’état et les besoins de l’éducation 2012-2014, j’avais évoqué l’existence de quelques points faibles de la réforme, mais le sujet n’était pas clos. […]

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