Une école publique pas suffisamment appuyée

Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec et au Journal de Montréal dans la section du blogue des «spin doctors».

Le même débat surgit à chaque rentrée scolaire depuis quelques années : certains parents confrontés à des dépenses qu’ils jugent démesurées se plaignent des décisions de l’école publique fréquentée par leur enfant.

L’article paru hier au Journal sur les récriminations d’une mère de famille mécontente de devoir procurer à son enfant un iPad pour apprendre à l’école illustre bien le manque d’appui de l’école publique dans sa volonté de mener un projet éducatif original et différent.

Le sujet est récurrent dans l’actualité. L’école secondaire publique est considérée comme étant un service public gratuit. Les écoles publiques qui veulent innover ne peuvent pas vraiment compter sur le soutien du ministère de l’Éducation ou sur celui de leur commission scolaire. Ils doivent se montrer très créatifs dans leurs initiatives. Même si elles consultent les parents et qu’elles s’appuient sur une décision du conseil d’établissement de leur école, elles sont à la remorque d’une minorité de parents qui s’appuient sur un encadrement législatif dépassé pour faire valoir leurs prérogatives.

L’an dernier, le Journal rapportait qu’une école publique n’a pas « le droit d’obliger les parents à acheter une tablette électronique pour leurs enfants en classe ».

C’est dans ces conditions qu’évolue une école secondaire de Charlesbourg dans la région de Québec qui depuis 2014 propose « des iPad pour tous les élèves ».

On connaît mon préjugé favorable pour l’école publique autonome et la capacité d’un milieu scolaire à innover pour favoriser les meilleurs apprentissages des élèves.

Comment concilier le respect intégral du principe de la gratuité scolaire dans une période de rareté des ressources budgétaires avec la volonté d’une communauté éducative d’innover ?

Je ne peux m’empêcher de penser à Seymour Papert quand je suis confronté à ce genre de dilemme, d’autant que j’apprenais son décès récemment.

Le professeur émérite avait eu cette répartie en 2002 quand on le questionnait sur combien ça prendrait d’ordinateurs dans une classe de 28 élèves pour bien servir les apprentissages : « Demandez-vous combien ça prendrait de crayon par élève ».

Seymour Papert était persuadé au début des années 2 000 que l’ordinateur était devenu le crayon d’aujourd’hui.

Il faut se désoler en 2016 que la situation ait si peu progressé quand on constate le manque de leadership de nos décideurs publics qui pensent encore trop souvent qu’on peut « faire l’école » en 2016 dans les conditions des années soixante au Québec.

En n’abordant pas de front ces questions de ce qui est nécessaire à un enfant à l’école aujourd’hui et demain pour bien apprendre et en se réfugiant derrière des directives d’interprétation des lois d’hier pour administrer l’éducation, on ne progresse pas.

Le plus petit dénominateur commun dicte le rythme avec lequel l’école publique progresse sur le thème de l’innovation.

Je ne blâme pas le parent de se protéger avec la loi, même si ça ça prête flanc à un certain manque d’ambition pour ses enfants.

Je m’interroge cependant sur l’ambition d’un ministre de l’Éducation qui s’en laverait les mains sur l’autel de la Loi sur l’instruction publique.

Dans un passé récent, quelques ministres de l’Éducation du gouvernement libéral élu ont préféré se cacher derrière les directives du ministère. Je n’ai aucune raison de croire que ce sera différent cette année…

Je plains les directions d’école publique en 2016 qui croient sincèrement que l’innovation passe par le fait d’offrir au moins « un crayon » par élève, dans ses conditions structurelles et politiques.

Avec ces chicanes qui perdurent, on compromet furieusement les chances qu’elles puissent se donner les moyens de leurs ambitions pour la jeunesse d’aujourd’hui !

Mise à jour de fin de journée: «On est concurrentiel», dit la commission scolaire.

Mise à jour du lendemain: Ma chronique sur les ondes de BLVD 102,1 FM de ce mardi matin portait sur le sujet « Les dépenses scolaires pour les Ipads sont-elles démesurées? ».

Mise à jour du 14 août:

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