Des questions et des réponses…

Cette semaine, j’ai pu constater davantage l’intérêt porté à nos programmes de formation du 3e cycle à l’Institut . Ce billet, en provenance de Suisse, est un exemple éloquent; plusieurs questions pertinentes me permettent de mieux faire connaître notre projet éducatif (par l’entremise des réponses, bien entendu…). Je précise que je tenterai de réfléchir tout haut en identifiant des éléments de réponses. J’invite toutes personnes, (parents, élèves, enseignants, partenaires) à contribuer tout comme l’a fait un parent, si généreusement, au bas du billet de Corinne.


Au niveau des élèves :
* Quels ont été les prérequis indispensables pour permettre aux élèves d’être dotés d’un portable et d’utiliser le cyberportfolio ?
« Indispensables », ouais !?! En terme de prérequis, je dirais que l’ouverture à une façon d’apprendre « moins linéaire » est certes une obligation. Bon nombre de personnes de l’extérieur croient à tort que CARRIERE est un programme technologique, avant tout. Je crois que la richesse des approches pédagogiques utilisées dépassent largement les exigences technologiques. Autrement dit, il est moins important d’avoir pu développer des habitudes d’utilisation des TIC que d’avoir pu cultiver une ouverture à travailler en communauté d’apprenants. Nous avons répété souvent qu’un élève qui est dans « sa zone de confort » en apprenant au contact des autres, en échangeant des points de vue (parfois divergents) et en favorisant la coopération (au lieu de la compétition) sera comblé par l’approche privilégiée en classe. Ensuite, je dirais que la curiosité intellectuelle, le sens de l’effort et l’amour d’un travail bien fait sont des qualités qui vont faciliter la réussite éducative des jeunes dans cet environnement. Je ne crois pas que des habilités techniques étaient bien nécessaires pour être élève à CARRIERE et devenir rapidement capable d’oeuvrer au contact des cyberportfolios. Je ne dis pas, que depuis trois mois, les élèves soient restés au même point dans le développement de leurs compétences à manier les TIC… mais je crois que certains avaient peu de prérequis et ils s’en sont très bien tirés ! Avoir à sa disposition un ordinateur portable a motivé davantage certains élèves et a donné plus d’accès à des outils puissants. Il ne fallait pas être motivé à priori; il fallait être « motivable » par les TIC !!!
* Continuent-ils d’être formés ? Cette formation est-elle spécifique à l’utilisation informatique ou plutôt à visée transdisciplinaire ?
Nous ne donnons pas de cours de logiciel. La formation technique se donne au contact des tâches à éxécuter, en fonction des besoins ponctuels. Parfois, certains élèves ont les mêmes demandes et nous les regroupons, mais généralement, ils s’aventurent par eux-même et nomment leurs besoins aux moments où des blocages se produisent; à ce moment, nous intervenons ou nous faisons intervenir des élèves qui ont les réponses. Nous faisons appel à des ressources externes parfois; les explications de bases au niveau des espaces de publication dans leur cyberportfolio ont été données par une personne qui connaissait très bien Movable Type, par exemple… Je dirais donc que la formation vise davantage le transdisciplinaire.
* Utilisent-ils également le portable en classe ? Est-ce que cela perturbe l’enseignement ?
Le portable est devant l’élève en classe et est disponible à tout moment. Il est utilisé sans fil, autant pour la connexion internet que pour l’alimentation électrique. Je dois dire que l’ordinateur est une ressource utilisée parmi d’autres (livres, crayons, papier, etc.), mais qu’il s’avère un outil précieux ! Au contraire de perturber, cela facilite les choses. Les élèves distraits par l’ordinateur l’étaient par toute une gamme d’autres motifs et comme ils veulent continuer de travailler de cette manière, on s’en sert comme levier pour motiver l’élève à lui apprendre à discerner qu’en classe, une utilisation pédagogique exclusive est nécessaire quitte à ce que la partie ludique survienne après la classe (impliquant l’encadrement des parents !). De nouveaux mots clés sont apparus… «Ferme ton écran et regarde-moi», au lieu de «silence S.V.P.»
Au niveau des enseignants :
* Qu’en est-il de l’implication des enseignants ?
Au départ, lors de l’annonce du projet, j’avais laissé entendre que nous ferions appel à des enseignants de l’extérieur pour encadrer les élèves. Je ne voulais brusquer personne. Je comptais déjà sur une enseignante qui avait travaillé en « pédagogie ouverte » avant d’être engagée à l’Institut. Je me suis employé à tracer un profil des enseignants recherchés et assez rapidement, des gens de l’interne ont manifesté un intérêt à faire partie « de l’aventure ». Encore ici, en haut de la liste figurait des aptitudes pédagogiques et non technologiques. Deux enseignants sur les quatre qui évoluent avec les jeunes ont des aptitudes de base pour l’utilisation des technologies (les deux autres ont des habiletés au dessus de la moyenne), et ne se considéraient pas « championnes » et particulièrement intéressées par ce volet du projet. Aujourd’hui, je serais porté à considérer qu’elles ne rencontrent pas de limite importante à évoluer dans cet environnement parce que la pédagogie utilisée leur permet de faire leurs apprentissages à ce niveau au fur et à mesure des besoins rencontrés.
Il faut dire que nous avons pu compter sur des fonds provenant de notre Fondation permettant une certaine libération des enseignants pour s’approprier et mettre au point l’outil du cyberportfolio. Une partie des fonds vient aussi permettre des aménagements techniques du logiciel (code source libre) en lien direct avec les besoins des élèves et des enseignants (l’arrivée de l’auto-évaluation et du tampon « texte de qualité » sont deux bons exemples).
Enfin, disons (et j’aurais du dire cela au début) que les enseignants se sont engagés à fond dans ce projet. Travailler de cette façon est inusité par rapport à ce qu’il ont connu et cela leur a beaucoup demandé. La planification pédagogique est coopérative, ils enseignent toujours en compagnie d’un collègue et ils partagent beaucoup avec les uns les autres. C’est assurément « un choc de pratiques ». Je ne sais pas si, à ce stade-ci, ils sont capables de nommer ce qu’ils constatent, mais en ce qui me concerne, j’observe beaucoup de travail de leur part, une grande satisfaction pour les apprentissages fait par les élèves, une grande satisafaction pour le fonctionnement technique de notre réseau, des outils (incluant les cyberportfolios) et de leur ordinateur portable et une impression d’apprendre beaucoup. Je suis très satisfait de leurs attitudes. Nous échangeons (et ils échangent souvent entre eux) beaucoup et souvent, les émotions sont fortes; mais devant les élèves, le cap est à la bonne humeur et le professionnalisme est au rendez-vous. Nous essayons ensemble de trouver les modes organisationnels qui permettent une efficacité et un rendement optimal dans l’organisation du travail, mais nous rencontrons des frustrations et je suis grandement impressionné par le sens de l’engagement des enseignants…
* Ont-ils bénéficiés d’une formation spécifique à ce sujet ?
Au fil des quatre dernières années où nous avons été « école ciblée » pour l’appropriation et la validation de la récente réforme du MEQ, nous avons bénéficié d’un soutien et d’une formation au niveau du travail par compétence et sur la diversification de nos approches et stratégies. En dehors de cela, certains enseignants sont allés chercher une formation plus pointue dans des domaines de leurs intérêts (formation technique, didactique et pédagogique). Aussi, trois des quatre enseignants ont passé trois jours dans le Maine à observer le travail des communautés d’apprentissages de Skowhegan qui oeuvrent dans un environnement où les élèves utilisent un ordinateur portable en classe. Avant le début de l’année, nous avons eu l’occasion de leur montrer l’environnement des cyberportfolios et l’espace de travail pendant quelques heures !
* J’ai eu l’occasion également de parcourir certaines pages personnelles restées vierges, à quoi est-ce dû ? Manque de temps, manque d’engouement ?
Je crois que c’est une question de priorité et de ressenti. Les enseignants contribuent surtout dans les espaces collectifs. L’espace de classe est abondamment utilisé et la salle des profs virtuelle après un début « canon » est un peu moins prisé , mais reste un lieu familier. Les enseignants s’emploient à contribuer sur les carnets individuels (privés et publics) des élèves et cela est devenu leur priorité (je suppose). S’il n’ont pas occupé leur espace personnel, c’est qu’il n’a pas été considéré comme « essentiel » dans la réussite du projet. Je crois qu’ils vont au plus pressant…
Je continue de croire que l’utilisation de l’espace personnel est en lien avec la découverte des bienfaits de l’objectivation. Ce n’est pas une pratique naturelle que d’objectiver. Il y a bien une question de temps, mais on trouve toujours du temps quand une occupation nous rapporte; pour l’instant, les enseignants ne pressentent pas de gains à faire à cet endroit et je respecte cela. Je crois qu’ils intuitionnent certaines découvertes à faire là, mais se gardent cela quand ils auront pris « le dessus » sur l’immense tâche à accomplir !
Au niveau des parents :
* Y a-t-il des parents qui se sont prononcés dévaforablement sur ce projet ? Ont-ils (eu) l’occasion d’exprimer leur enthousiasme ou leur crainte lors des rencontres qui ont été agendées ces derniers semaines ?
Ma perception à ce niveau est fortement représenté par le commentaire du parent qui s’est exprimé sur votre carnet. Nous avons fait le choix d’expliquer le projet et de laisser choisir les gens. Il y a des parents qui nous ont clairement dit que ce fonctionnement ne les intéressaient pas. Dans certains cas, j’ai moi-même déconseillé la fréquentation du programme à certains élèves (en parlant directement aux parents) qui ne possédaient pas les prédispositions pour bien évoluer dans cet environnement. Pour les autres volets de votre question, je crois qu’effectivement, les parents ont eu l’occasion d’exprimer leurs craintes; il y avait un certain « acte de foi » à faire même si le projet repose sur des bases solides et des ressources éprouvées. Il était important d’accueillir ces craintes. Nous en accueillons encore d’ailleurs, et cela nous aide à ne rien prendre pour acquis. Nous sommes grandement encouragés par la réaction des parents. Nous venons de vivre la visite des parents consécutive à la remise des bulletins et nous pouvons apprécier la satisfaction des parents. Nous gardons le cap !
Au niveau de l’institution, des autorités :
* Quid des attentes des insitutions ou autorités qui ont permis la mise en place de ce projet ? Expérience prototype pour la région ? Pressions de réussite ?
Le rayonnement de ce que nous vivons nous porte à croire que d’autres projets du même genre seront tentés. À l’école, nous évaluons souvent la réussite d’une initiative par le nombre d’inscriptions qu’elle génère et dans ce cas-ci, il convient de nommer que c’est un grand succès. Il sera intéressant de regarder combien des jeunes nous accueillerons l’an prochain; ça regarde bien ! Personnellement, je garde « le focus » sur les apprentissages. Je suis centré sur ce que je lis, sur ce que j’entends de la part des adultes et des jeunes. J’aime ce que je vois. J’aime ce que j’entends.
Il y a des conditions existantes à l’Institut actuellement qui ont favorisées l’émergence de notre projet de cheminement dans deux programmes, mais il pourrait être difficile de rassembler ce contexte (partenariat externe et connivence interne) dans un autre environnement. Cela reste à voir et il ne m’appartient pas d’en décider… Étant une école privée, nous ne sentons pas de pression à exporter l’idée si ce n’est que nous allons coopérer de notre mieux avec les gens du Collège Saint-Charles Garnier qui veulent accueillir certains de nos finissants au secondaire dans un programme relais, « Le rallye international ».

6 Commentaires
  1. Ytsejamer 19 années Il y a

    Après trois mois d’implantation, quels sont les indicateurs de communauté d’apprentissage que vous remarquez dans les classes? Je demande cela parce que j’ai visité plusieurs cybercarnets de l’école et j’ai l’impression que ces indicateurs ne sont pas représentés à leur juste valeur parmi les exercices de grammaire plus conventionnels. Les retours réflexifs des élèves concernent davantage ces exercices – par exemple, certains élèves mentionnent: »J’ai appris à accorder les participes passés employés avec être et avoir » – que ce qu’ils ont pu vivre et apprendre dans le cadre d’une démarche collective de type communauté d’apprentissage.

  2. Mario Asselin 19 années Il y a

    C’est une observation intéressante. Je crois que nous pourrions reprendre vos indicateurs (voir ce billet) et s’en servir pour faire réfléchir les élèves…
    Diversité d¹expertise parmi les membres qui sont valorisés pour leurs contributions ;
    La question pourrait être : «Pourrais-tu nommer une contribution (un billet, une intervention ou un travail) d’un élève de la classe dont tu te souviens et qui t’a appris quelque chose que tu ne savais pas et que tu juges important ?
    Objet partagé qui permet le développement continuel des savoirs et des habiletés de la communauté ;
    En quoi les cyberporfolios te permettent d’augmenter ce que tu sais et d’améliorer votre capacité de travailler en groupe ?
    Capacité métacognitive qui incite les membres à s¹interroger sur les façons dont l¹apprentissage survient (apprendre à apprendre) ;
    Pourrais-tu nommer un moment depuis trois mois où tu as découvert une façon d’apprendre qui est bonne pour toi ?
    Mécanismes qui permettent le partage des savoirs et des habiletés développées.
    En quoi le fait de publier sur tes espaces privé et public contribuent à augmenter le partage entre toi et les autres élèves de la classe CARRIERE ?
    Que penses-tu de ces questions Stéphane ? Est-ce que les réponses pourraient répondre aux préoccupations que tu nommais au départ ? Si c’est le cas, je pourrais voir avec les enseignants ou Véronique comment on pourrait procéder pour la suite…

  3. Ytsejamer 19 années Il y a

    Ces questions constituent des pistes intéressantes qui permettraient probablement d’aller chercher une certaine rétroaction auprès des élèves quant à l’utilité actuelle de l’outil utilisé.
    J’ajouterais que les indicateurs et les jalons de la communauté d’apprentissage ne sont pas qu’une grille de lecture qui sert à posteriori de la réalisation d’une activité ou d’un projet d’apprentissage. Ils constituent aussi un outil de planification et d’exécution de la démarche éducative. J’entends par là: de quelles façons ces outils conceptuels sont-ils mis à contribution par les enseignants dans les décisions qu’ils prennent, autant dans le design des activités qu’ils soumettent aux élèves que dans les décisions qu’ils prennent dans le cadre de la vie quotidienne de la classe? Ces décisions ont un impact considérable sur les apprentissages des élèves et la façon dont ils en rendent compte et les relatent.

  4. Photo du profil de Corinne
    Corinne 19 années Il y a

    Merci pour tout ….
    Pour les réponses précises,
    pour le temps pris pour y répondre,
    pour le travail et l’enthousiasme montrés !

  5. Photo du profil de BONIFagbemiJoseph
    BONIFagbemiJoseph 18 années Il y a

    La pédagogie comme on le dit, est un travail de recherche continue.MARIO a donné un exemple éloquent avec la rubrique dénommée MARIO TOUT DE GO dans le site cyberportfolio de l’Institut ST Joseph.j’en suis agréablement ravi. Je le remercie de m’avoir donné l’occasion de voir et d’apprécier ce travail de géant.

  6. Photo du profil de BONIFagbemiJoseph
    BONIFagbemiJoseph 18 années Il y a

    Une vaste culture, beaucoup de bon sens, infiniment de dévouement; voilà les qualités que doit cultiver un bon professeur. À cela, on peut ajouter une autre: l’amour des enfants.

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