Le plaisir de s’arrêter

«L’écriture est une lettre que je m’écris à moi-même pour m’expliquer le monde.»

Ces mots de Michel Tremblay me trottent dans la tête depuis hier soir. Le merveilleux documentaire du cinéaste Terre-Neuvien Adrian Wills m’habite profondément au travers des corvées d’une fin de long congé. Tellement, qu’il me faut écrire entre deux transports au soccer pour fiston, une «batche de sauce à spag» et le ménage de la piscine. Entendre le traducteur Martin Bowman rapporter qu’au lendemain de la création écossaise des Belles-Soeurs à Glasgow (en 1987), une critique locale a affirmé qu’il s’agissait «d’un moment qui va transformer le théâtre écossais à jamais», m’a montré jusqu’à quel point la culture constituait un outil extraordinaire pour rassembler les humains.

Il est beaucoup question du Japon et de l’Écosse dans le documentaire. À l’écran, les femmes Japonaises et Écossaises semblaient radieuses de pouvoir enfin s’exprimer «Entre les mains de Michel Tremblay» par le portrait des quartiers pauvres et ouvriers de Glasgow ou de Tokyo. Traduite, l’oeuvre de Tremblay a agi tel un révélateur de la culture de ces deux pays et a permis que s’exprime l’inexprimable. Comme c’est un Québécois qui l’a écrit, on a pu monter la pièce sur le précédent causé chez nous. Tremblay s’est tapé tout le travail de résister aux détracteurs pour qui le joual et le langage du peuple ne pouvaient avantageusement tenir l’avant-scène. On parle de la période 68-69-70-71…

Je n’aurais pas écouté ce documentaire dans les conditions normales. J’ai trop à faire professionnellement en fin de soirée pour «me brancher» sur ce genre de sujet. Quel malheur… Je constate depuis vendredi soir d’ailleurs les effets bénéfiques d’une pause. Je vis les choses très intensément et j’ai peine à laisser les trucs un peu «hors champ » m’influencer. Je ne suis pas en train de dire que le domaine de la culture fait partie de ces sujets en dehors de mon rayonnement, mais si on m’avait dit «vient écouter un documentaire sur Michel Tremblay, tu vas voir combien ça va t’aider à comprendre ce que tu fais sur ton blogue», je ne n’aurais pas compris tout de suite l’importance de m’y arrêter. Pourtant, j’y ai découvert pendant l’écoute l’importance de ne «jamais penser à l’impact qu’on peut avoir en écrivant». Pas banal…

Trop souvent, les effets potentiels d’une réflexion postée dans la blogosphère effleurent mon esprit et m’empêchent d’aller au bout de ma recherche personnelle. Ce n’est pas dans ce que j’écris et publie que le problème se pose; j’assume totalement ce qui compose mon blogue. Je n’écris pas pour obtenir des réactions, mais il m’arrive parfois de ne pas écrire par crainte des réactions, de mon point de vue, de ceux dont j’ai connaissance qu’ils passent par ici. Ce faisant, je me prive d’un contact plus intense avec «qui je suis», laissant «qui sont les autres» (ce que je pense qu’ils sont, du moins) éditer mon blogue (non-éditer, si on peu ainsi dire…).

Un exemple de cela m’est arrivé la semaine dernière au retour d’une conférence à Ottawa. Il est très rare que je n’objective pas une activité de formation à laquelle je contribue. À part le billet-test «Je suis à Ottawa» (que j’ai effacé depuis), il n’y a pas de trace ni des diapos, ni des échanges de cet avant-midi de travail. En y réfléchissant, je constate que je ne me mets pas au clavier parce que je suis branché sur ce que les autres vont dire de ce qui est remonté dans l’auto au retour et depuis. Loin de moi la tentation de penser que ce que je peux écrire a un pour cent de l’impact de ce qu’a écrit Michel Tremblay, le point n’est pas là. Mais si je suis sérieux dans ma volonté de contribuer à changer le monde (par le biais des façons d’apprendre), je vais au moins prendre la peine de laisser ce que je pense émerger même quand ce que j’anticipe comme réaction ne va pas aller dans le sens que je souhaiterais…

Je retourne à mes occupations cléricales et j’y reviens plus directement…

… en tout cas, j’espère.

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2 Commentaires
  1. florence meichel 15 années Il y a

    Bonjour Mario
    J’aime bien cette réflexion, ce retour sur soi, ce questionnement intime que vous partagez avec nous…On ne peut pas plaire à tout le monde ! comme dirait l’autre ! 🙂 et puis ce qui fait la variété et l’intérêt de la blogosphère, n’est-ce pas justement cette haute authenticité de ses nombreux auteurs-acteurs…enfin jusqu’à présent ! … car les tentatives normatives répétées sous couvert de morale bien pensante détermineront peut- être d’autres chemins pour la blogosphère….ce serait triste ! Enfin c’est ma vision des choses !
    Très bonne journée à vous et merci pour ce partage

  2. Photo du profil de JacquesCool
    JacquesCool 15 années Il y a

    Une introspection qui me touche, fondamentalement. Merci pour ce partage!
    « Trop souvent, les effets potentiels d’une réflexion postée dans la blogosphère effleurent mon esprit et m’empêchent d’aller au bout de ma recherche personnelle. »
    Tu as donc raison! Ça illustre toute la puissance des outils de réseautage social; on est à cheval sur une fusée… Mais le voyage en vaut la chandelle 😉

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