Espaces Numériques de Travail: Où en sommes-nous dans le secondaire?

Mise en garde: J’ai accepté une invitation média à participer à l’Université d’été dédiée aux professionnels francophones du multimédia ludo-éducatif et pédagogique 2008. Ce billet qui paraîtra dans Ludovia Magazine fait partie de l’entente qui justifie ma présence en Ariège; je préfère que vous soyez prévenu du fait que j’ai bénéficié de certains avantages pour la réalisation de ce compte-rendu.
La Table ronde inaugurale de l’Université d’été Ludovia a permis à plusieurs personnalités représentant des institutions phares en éducation de faire le point sur la généralisation des Espaces Numériques de Travail dans le secondaire, en France et au Maroc. Sous la gouverne de Gilbert Azoulay de l’AEF, la parole a alternativement été donnée à Augustin Bonrepaux (Président du Conseil Général de l’Ariège), Martin Malvy (Président du Conseil Régional Midi-Pyrénées) et Olivier DUGRIP – Recteur de l’Académie de Toulouse et Chancelier des Universités qui nous ont entretenu de leur vision d’élus relatif au développement du secteur du multimédia Ludo-éducatif. Les différentes façons de combattre les fractures du numériques ont démontré la volonté de chacun de faire du coin de pays qui accueille Ludovia un endroit d’avant-garde en France. Après un petit clin d’oeil sur les coupures de postes en éducation qui préoccupent bon nombre d’intervenants, le sujet des ENT a pris toute la place. Les interventions de Serge Bergamelli (Caisse des Dépôts et Consignation) ont semblé donner le ton aux quelques échanges. «Si le secteur public ne construit pas des univers performants pour les jeunes, ce service risque de disparaître de la préoccupation des jeunes» a-t-il ajouté d’entrée de jeu se montrant à la fois réaliste sur les difficultés à «expliquer ce que nous voulons favoriser avec les ENT» autant que sur le temps pris aux fins d’appropriation de ces mêmes ENT.
Cette notion «de durée», Pierre Danel (CTICE – Académie de Clermont-Ferrand) en a parlé comme d’une période où «on accompagne les élèves dans tous ces changements pour qu’ils en tirent le meilleur avantage au niveau des apprentissages et de la vie citoyenne. L’expression «Expérimenter la généralisation» était lâchée; car c’est bien ce dont il s’agit! Les appétences pour l’usage de l’ENT se développent «à géométrie variable» pour employer une expression d’un des panélistes ce qui préoccupe chacun puisque l’objectif de cette phase de généralisation est bien de s’approcher plus rapidement du branchement de 30 millions de comptes potentiels. Jean-Yves Capul (SDTICE) a traité de cette question en parlant d’un «enjeu très important au niveau de la réussite scolaire, selon le ministère de l’Éducation nationale». Ce pari sur les ENT vient du fait qu’ils seront, à terme, de puissants leviers pour développer de nouveaux liens avec les parents, leur faisant mieux connaître les exigences de l’école. Surtout, ils représenteront la continuité entre ce qui se fait en classe et en dehors de la classe…
Philippe Portelli (SCEREN CNDP) a raconté jusqu’à quel point les dirigeants de son organisme étaient «fortement sollicité depuis quelques mois» sur ce sujet des ENT. Heureusement, chacun s’affaire à trouver des solutions concrètes en insistant pour fournir une portion de contenu pour les enseignants qui viennent du domaine de la recherche puisque les fruits du travail des chercheurs «ne sont pas facilement accessibles aux enseignants alors, on vulgarise…»
Enfin, Alain Séré (IGEN économie et gestion) a beaucoup insisté de son côté pour «qu’on inscrive dans le quotidien des établissements la préoccupation de l’intégration du numérique». Un point intéressant qu’il a apporté est à l’effet que les chefs d’établissement n’ont pas encore vraiment intégré suffisamment dans leur management les outils numériques, ce qui expliquerait peut-être une partie des délais. La mise en place d’un observatoire général des TICE voulant favoriser le dialogue entre tous les intervenants privés et publics ne pourra que produire davantage de conditions pour s’assurer que la démarche de généralisation des ENT produise le maximum de résultats positifs.
Quant à savoir si le concept d’ENT est le seul porteur des réponses à attendre d’un observateur qui veut voir les usages se multiplier… On en reparlera! Après tout, le but de cette table ronde consistait à rendre compte d’un certain «état de situation» sur les ENT. L’événement s’est conclu avec les mots de nos invités du Maroc… «Et si la solution était d’ouvrir les ENT aux usages personnels des jeunes et des enseignants?» Voilà une piste intéressante soumise par Abdelfdil Bennani, Président de l’Université d’Agadir.

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2 Commentaires
  1. Photo du profil de Pierre-LouisGHAVAM
    Pierre-LouisGHAVAM 14 années Il y a

    Cette table ronde sur la « généralisation des ENT » m’a laissé un étrange, mais persistant sentiment qu’on ne nous disait pas tout, et que les intervenants (Rectorat de Clermont-Ferrand excepté) pratiquaient volontiers les méthodes Coué, YAKA ou YAPLUKA.
    Je détaille un petit peu :
    Dans son intervention, le représentant du Ministère de l’Education a toujours usé du futur de l’indicatif, comme si l’expérience devait commencer demain et que l’on en était à la l’exposé des voeux :
    « …les parents pourront consulter cahier de texte de la classe, les notes de leurs enfants… »
    « …les enseignants pourront communiquer avec les familles et réciproquement… »
    « …les eleves absents pourront consulter le cahier de texte de la classe et récupérer des éléments pendant leur absence… »
    « …les enseignants pourront personnaliser le travail, et l’individualiser pour chaque élève… »
    « …les enseignants pourront indiquer les ressources numeriques aux élèves… »
    Puis, il a rappelé que les ENT sont désormais en phase de généralisation, puisqu’aujourd’hui 16 régions (sur 22), et 40 départements (sur 100) ont mis en oeuvre une telle démarche et que l’appel à projet du Ministère date de mars 2003 (notifié en juillet 2003).
    Le représentant de la Caisse des Dépôts, organisme financier des collectivités territoriales, intervient comme toujours brillamment et de façon convaincante et rappelle que derrière les ENT, il s’agit en réalité de l’évolution, de modernisation de l’école, du changement de mentalités des enseignants (travail en équipe, sortir du sanctuaire), ce qui sera long (une décennie) et que l’ENT doit accompagner cette conduite au changement. Il rappelle et insiste sur cette notion de durée et d’accompagnement..
    Je veux bien que l’on prenne du temps pour avoir des retombées positives d’utilisation. Après tout comme l’a dit le Rectorat de Clermont-Ferrand, ce n’est pas une problème informatique ou d’ingénierie pédagogique c’est avant tout un problème de société humaine et collective et ce temps, je l’ai pris dans les Landes (au point d’avoir rencontré une personne d’IBM qui pensait que l’opération s’était arrêtée sur un échec !)
    Les principes ou les attendus initiaux de l’ENT ne me gène pas MAIS il faut être franc et honnête quand on en rend compte (not again’s you, dear Mario) ce qui suppose deux ou trois choses :
    1/ Que l’on cesse de communiquer en terme de surface (http://www2.educnet.education.fr/sections/services/im_services/entcartedevel/preview, ou anciennement, http://www2.educnet.education.fr/sections/services/im_services/carte_ent/file) mais en terme d’établissements ouverts c’est-à-dire de « points » sur une carte. Quand vous lisez cette carte impressionnante (et faite pour, d’ailleurs) vous avez l’impression que la moitié de la France possède un ENT! Quand vous lisez cette liste (http://www2.educnet.education.fr/sections/services/ent/scolaire/deploiement) vous vous dites, mazette des régions entières, des départements entiers mais ça doit faire un paquet d’établissements tout cela ?
    Et là patatras, vous découvrez qu’en Ariège par exemple, il n’y a que 6 établissements dotés de l’ENT depuis janvier 2007 sur une totalité de 33 (collèges + lycées).
    Dans la région Auvergne, c’est un peu mieux 71 établissements (http://www3.ac-clermont.fr/ENTAuvergne/documents/carte_ENT_septembre_2008.pdf) sur un total de 200 (http://www.ac-clermont.fr/Communication/Cartes/Reseaux/20072008/pubcart2008coul.pdf)
    En Savoie, sur 38 collèges, il y en a 18 soit la moitié qui sont équipés de l’ENT Collaba.
    Je n’ai pas trouvé de territoire où il y ait davantage d’établissements équipés que la moitié. Je n’appelle donc pas cela généralisation. Dans les Landes, les Bouches du Rhones, l’Ille et Villaine, prochainement l’Oise et la Corrèze, ce sont tous les collégiens qui sont équipés d’ordinateurs portables, et là on peut dire que là c’est une généralisation.
    Mais bon, Paris ne s’est pas fait en un jour, regardons donc les chiffres d’utilisation dans les établissements équipés.
    2/ Que l’on nous communique chaque année, les chiffres des usages réels des différentes solutions déployées : logs de connexion pour chacun des acteurs de la communauté scolaire, récurrence des connexions, etc. Et là c’est qu’on est estomaqué : depuis 2003 cela fait cinq ans, et devant une telle carte de 56 collectivité, il devrait bien y avoir des chiffres réels des utilisations et de fréquence et nous devrions savoir si :
    OUI ou NON « …les parents consultent cahier de texte de la classe, les notes de leurs enfants… »
    combien de fois (récurrence) ? tous les parents ? qu’est ce que cela apporte de plus que le cahier de texte papier consultable au collège ? est ce que cette belle idée est-elle une demande des parents ou bien une extrapolation de l’administration centrale qui se dit qu’avec ce type d’argument c’est plus facile de faire payer les collectivités pour la mise en place de l’ENT ?
    OUI ou NON « …les enseignants communiquent avec les familles et réciproquement par le biais de l’ENT… »
    combien de fois (récurrence) ? tous les enseignants ? qui prend l’initiative la famille ou l’enseignant ? est-ce plus aisé comme on le prétend de communiquer via l’ENT plutôt que par simple mèl ou bien encore de prendre rendez vous avec le professeur dans l’établissement ? on aimerait en savoir plus…
    OUI ou NON « …les élèves absents consultent le cahier de texte de la classe et récupérer des éléments pendant leur absence… »
    c’est un service pratique et bien prévu dont on ne discute pas l’intérêt, mais dont on aimerait bien savoir si tous les professeurs d’un établissement mettent bien le contenu a disposition et si les élèves absents les récupèrent ou non ?
    OUI ou NON « …les enseignants personnalisent le travail, et l’indivisualisent pour chaque élève… »
    tous les enseignants ? pour tous les élèves ou pour une partie ? combien de temps cela leur fait il gagner par rapport à avant l’ENT ?
    OUI ou NON « …les enseignants indiquent les ressources numériques aux élèves… »
    combien de ressources ? qui les a choisi ? quelle taux de connexions et d’utilisation ? fait-on mieux que les ressources prépayées d’ENEE et des trois versions d’ENS (http://edel.univ-poitiers.fr/rhrt/document.php?id=655) où les usages étaient catastrophiques par rapport aux attentes du Ministère et au coût des ressources ?
    OUI ou NON les parents utilisent-ils cet outil ?
    OUI ou NON tous les enseignants d’une même classe utilisent cet outil ?
    Parce que sinon quel intérêt ? d’avoir trois où quatre champions qui sont moteurs, c’est certes très bien mais si le reste ne suit pas ce n’est pas très utile dans le secondaire (dans le primaire ce serait fameux puisqu’il y a unicité d’enseignant) car il y a alors tout doit être doublé numérique via l’ENT et papier pour les enseignants traditionnels. Comment les parents peuvent ils se dire celui ci, je communique avec lui par la messagerie de l’ENT, celui-là ne l’utilise pas ? c’est kafkaïen comme situation.
    Eh bien non, nous ignorons la réalité de ces chiffres et lorsqu’a eu lieu, mercredi après-midi à l’hôtel de ville d’Ax-les-thermes, la réunion de tous les porteurs de projets ENT, elle fut faite à huis clos, et l’entrée m’en fut interdite par le Ministère et la Caisse des Dépôts parce que le Département des Landes dans lequel j’appartiens, bien que retenu dans les projets de mai 2003, n’a pas signé de convention avec la Caisse des Dépôts. Vous avez dit transparence ?
    Ces chiffres importent doublement, par transparence mais surtout dans la durée : il vaudrait mieux qu’ils évoluent à la hausse d’une année sur l’autre, si vous voulez convaincre.
    Tout le monde comprendra, je l’espère que les collectivités ont besoin de connaître les réponses avant d’engager des moyens, sinon votre discours plein de bonnes intention relève peut-être abusivement de la méthode coué.
    3/ Si tous les chemins mènent à Rome, il n’y a qu’une unique voie ferrée pour les usages dans l’éducation française : l’ENT. Ne pas la suivre et émettre des doutes c’est au propre comme au figuré dérailler… Cher Mario, tu as fait un article sur la convergence unique j’y adhère totalement, et puisque Bruno Devauchelle a retrouvé son texte de 2004, je partage avec lui sa conclusion.
    Pour augmenter les usages scolaire des TICE, pour faire évoluer l’éducation et ses pratiques, j’ai une double approche différente : équiper les utilisateurs avec un terminal informatique mobile, et équiper les classes d’outils de visualisation collective.
    Sur l’ENT, oui je l’avoue j’ai changé d’avis, et je suis plus dubitatif qu’en 2001 lorsqu’avec Alain Jaillet nous avons déployé l’Etablissement Scolaire Virtuel (http://ulpmultimedia.u-strasbg.fr/ESV3/index.html) dans trois collèges landais (sans succès mais pas sans avoir tiré les leçons de l’échec). Je suis réservé sur la bonne gouvernance entre les collectivités et l’Education nationale depuis qu’avec quatre autres collectivités nous avons dû passer sous les fourches caudines du Rectorat pour la tentative de mise en place de l’ENT ARGOS en Aquitaine.
    J’arrête de rêver à un monde meilleur dans l’éducation surtout si on me le promet pour après-demain, je crois maintenant ce que je vois et pas ce qu’on me dit.
    En 2004, la CDC, la FING et d’autres (Serge Pouts-Lajus) ont édité un ouvrage « Du cartable électronique aux espaces numériques de travail » (http://www.fing.org/jsp/fiche_actualite.jsp?STNAV=&RUBNAV=&CODE=5062) qui doit à mon sens être révisé.
    Voilà le texte de la 4e de couverture, entre guillemets

    « Malgré des résultats positifs, les nombreux projets de « cartable électronique » nés depuis 2000 peinent à se généraliser pour quatre raisons majeures : leur coût, lorsqu’ils supposent un équipement individuel ; une relative incertitude sur leur impact pédagogique ; l’immaturité des outils ; et la difficulté à élargir les usages au-delà d’une communauté de pionniers. »

    En 2008, il faut réviser ce jugement.
    Les coûts des matériels ont considérablement baissé et avec l’arrivée des subnotebook, cela change la donne sur l’immaturité des produits. L’incertitude pédagogique est a mesurer sur la durée comme l’ont dit Bergamelli et Danel à Ludovia ; Quand à la difficulté a passer le cap des geek, je constate que l’ENT ne fait pas mieux!
    « Se définissant comme «un point d’accès unifié à l’ensemble des outils, contenus et services numériques en rapport avec l’activité de chacun», l’espace numérique de travail (ENT) vise à dépasser ces limitations. Il affirme dès l’abord un objectif de généralisation : à tous les établissements d’un territoire, mais aussi à tous les acteurs, élèves et enseignants bien sûr, mais aussi direction, administratifs et techniciens, parents… L’ENT prend en compte la mobilité des enseignants et des élèves, tant dans l’établissement qu’en dehors. Il peut être utilisé dans toutes les circonstances de la vie d’un établissement, depuis les tâches administratives et de vie scolaire jusqu’à la classe, depuis la préparation d’un cours jusqu’au travail des élèves, depuis la gestion du site web jusqu’à l’alerte des parents en cas d’absence d’un élève…  »
    Supprimez ENT et remplacez le par ordinateur portable ou tout terminal informatique et vous verrez que la phrase se maintient. C’est justement ce que nous faisons dans les Landes depuis maintenant huit ans.

    « Bref, l’ENT est le « chaînon manquant » entre l’équipement et l’usage, entre la théorie et la pratique généralisée des TIC dans l’éducation. »

    Ben voyons, le minitel et le bi-bop étaient aussi des chainons manquant, et l’on sait ce qu’il en sont advenu!
    Je ne travaille pas dans une secte, je ne suis pas un zélateur d’une religion, je doute fortement qu’il existe une unique voie pour arriver à ses fins. L’ENT peut en être une, sur la durée, et dans certaines conditions de généralisation et d’accompagnement, mais arrêtez avec la pensée unique ce n’est pas la seule.
    Cordialement,
    Pierre-Louis GHAVAM

  2. Photo du profil de JDub
    JDub 14 années Il y a

    Bonjour,
    Il me semble, au vu du compte-rendu fait par Mario, que l’ENT est une panacée et que tout est possible mais on ne sait pas trop de quoi on a vraiment besoin … Je pense qu’il y a deux aspects fondamentaux à dissocier quand on parle ENT :
    – l’outil administratif (gestion des notes, absences, liaison avec les parents, …)
    – l’outil pédagogique (support pour des activités, blog, wiki, partage de contenu, podcast, …)
    L’appropriation d’un ENT ne se fera pas en imposant l’outil selon la volonté des décideurs mais plutôt en répondant aux besoins des différents acteurs de la communauté éducative. On se rend ainsi compte que des outils grands publics simples (blog, wiki, partage de signets, …) permettent déjà à des enseignants de faire des travaux très riches avec les étudiants (un blog pour apprendre, apprendre avec les blogs ou prodageo par exemple) sans la lourdeur liée à un ENT.

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