Pourquoi faudrait-il renoncer aux devoirs et aux leçons ?

Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec dans la section « blogue ».

Une enseignante de l’école primaire Les Pionniers à Saint-Augustin-de-Desmaures a fait l’expérience de ne donner ni devoir ni leçon pendant toute une année scolaire aux élèves de cinquième et sixième année de sa classe et conclut que pour elle, les devoirs et leçons, c’est fini!

Parmi les arguments qui militent pour cette façon de faire, il y aurait «alléger le quotidien des parents», «permettre aux enfants de se reposer le soir, d’aller jouer dehors, de faire autre chose» et «économiser le temps perdu à expliquer les devoirs, à corriger les devoirs et à vérifier qui les a faits ou non».

« Ça prenait beaucoup de temps dans une semaine. Maintenant, je ne fais qu’enseigner! »

Les devoirs et les leçons semblent encore exister dans cette école puisque de nombreuses capsules d’aide sont offertes aux parents sur le site Web de l’école… On ne parle donc pas d’une politique d’école, mais d’une initiative particulière. L’autonomie professionnelle reconnue aux enseignants permettrait, semble-t-il, de mettre fin aux devoirs et aux leçons.

Cette pratique du «zéro devoir/zéro leçon» appliquée sur une année scolaire sert-elle bien les apprentissages et la réussite scolaire ? J’en doute…

Je sais bien qu’à la maison, le travail après l’école peut générer beaucoup de tensions et parfois même troubler sérieusement la quiétude familiale. Plusieurs familles préfèrent que les devoirs et les leçons soient réduits au minimum, mais d’autres se servent de ce moment pour mieux comprendre le cheminement scolaire de leur enfant ou obtenir de l’information sur ce qui compose le menu pédagogique de l’enseignant. À tort ou à raison, des parents gardent ainsi un certain contact avec l’école. Aussi, en observant les façons de faire de leur enfant, des parents semblent obtenir des indices du niveau prévisible de leur degré de réussite et décident d’augmenter ou de relâcher l’encadrement.

Je suis davantage préoccupé par l’utilité du travail après l’école sur la qualité des apprentissage des élèves. Leurs impacts sur la tâche des enseignants ou sur la vie des parents, quoique non négligeables, me paraissent secondaires.

En février dernier, le professeur Normand Baillargeon (UQAM) a publié un billet dans lequel il dépeint la réalité complexe se cachant derrière ce sujet qui paraît plus simple qu’il ne l’est : « Leçons sur les devoirs ». La recherche crédible démontre que « les devoirs ont bien un effet positif sur la réussite scolaire », particulièrement au secondaire.

« Au primaire, les recherches suggèrent que les devoirs devraient être utilisés avec prudence et retenue. C’est que les élèves, encore peu savants, ont du mal à distinguer l’accessoire de l’essentiel, à ignorer comme elle doit l’être l’information non pertinente et, travaillant seuls pour les faires, ils ne reçoivent pas immédiatement l’indispensable feedback qu’il leur faut recevoir. »

Des chercheurs auraient démontré que le fait pour des parents de souligner que le travail scolaire à la maison est important, « a des effets bénéfiques et contribue à ce que les enfants les valorisent à leur tour, eux et elles aussi ». Au secondaire, le très fort impact des devoirs et leçons tient au fait que « des devoirs en grande partie centrés sur des tâches précises, sur la répétition d’habiletés plutôt que sur de l’apprentissage en profondeur, restent les plus efficaces et les plus recommandables ».

Ces résultats semblent rejoindre ceux du Conseil canadien sur l’apprentissage et du Réseau d’information pour la réussite éducative du CTREQ. Quant à lui, le Conseil supérieur de l’éducation – dans un avis formulé en mars 2010 – « invite les écoles primaires du Québec et les parents à réfléchir sur l’opportunité de donner des devoirs aux élèves…

Si les devoirs et les leçons s’avèrent si utiles au secondaire et qu’on n’en donne plus du tout au primaire, sera-t-on mieux disposés pour augmenter la réussite scolaire ?

Quand on se rappelle que cesser de donner des devoirs et des leçons aux élèves a déjà été considéré comme des moyens de pression en 2005 par la Fédération des syndicats de l’enseignement et jugé des services essentiels par les commissions scolaires, ont doit reconnaitre que le débat sur leur pertinence est un peu mieux engagé actuellement.

Mais la question demeure : pourquoi faudrait-il renoncer aux devoirs et aux leçons ?

Mise à jour du 3 juin : Texte de Vincent Beaucher sur le sujet.

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