Au tour de Yves Bolduc de livrer

Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec dans la section « blogue ».

J’en parlais au micro de Catherine Lachaussée hier après-midi, maintenant que Gaétan Barrette a livré la marchandise, la pression est forte sur le ministre de l’Éducation, Yves Bolduc.

Inutile de rappeler son mauvais début en tant que ministre (livres de bibliothèque, taxes scolaires, primes de 215 000 $). Il doit essayer de passer à autre chose et en ce contexte de révision des programmes, recentrer son mandat pour donner aux écoles publiques les moyens de leurs ambitions.

Enlever au privé pour donner au public serait une très mauvaise idée.

Chaque élève qui migre du privé au public coûtera plusieurs milliers de dollars à l’État parce que le ministère de l’éducation envoie beaucoup moins d’argent à une école privée pour un même élève, qu’à l’école publique. L’étude de l’Université de Sherbrooke est très claire sur le sujet : une augmentation des frais de scolarité aussi faible que 1 000 $ au primaire ou au secondaire entraînera un départ du tiers des 90 000 élèves qui transféreront vers le réseau public. Combien d’écoles privées seraient capables de survivre avec une perte du tiers de ses élèves ? Quels avantages l’État retire-t-il à se priver des 600 millions $ que payent les parents en frais de scolarité dans les écoles privées du Québec ?

Je ne suis pas inquiet pour la vingtaine d’écoles qui sélectionnent leurs élèves à Montréal qui ont une place disponible pour six ou dix demandes, mais à Québec, il n’y a que très peu d’écoles qui disposent de plus de demandes que de places disponibles. On devrait en prendre conscience (lecture supplémentaire sur ce sujet).

La migration du tiers des élèves va entraîner un déboursé de l’État pour beaucoup plus que ce tiers. Sur le strict plan des finances, réduire les subsides au privé va entraîner une augmentation des budgets et ce n’est pas ce que recherche Yves Bolduc.

La démocratie scolaire
En dépensant 20 millions $ dans des élections scolaires, j’imagine que le ministre Bolduc donne une dernière chance à la population de démontrer son intérêt aux commissaires élus. C’est la seule manière de justifier cette dépense, à ce moment-ci. Et encore…

Une fois élus, il les rencontrera pour aborder, entre autres, l’enjeu de l’abolition des commissions scolaires, au début de novembre.

Bizarre, mais bon… c’est comme ça.

Je ne comprends toujours pas pourquoi on investit si peu dans l’exercice démocratique local des conseils d’établissement, ce qui constitue en quelque sorte les conseils d’administration de chaque école. De toutes les réformes que devraient commencer à envisager Yves Bolduc, celle qui consiste à augmenter de beaucoup le pouvoir des milieux locaux devrait être la première sur sa liste. En donnant du pouvoir à ces organisations, on verra plusieurs parents s’intéresser aux décisions qui s’y prennent et autant du côté des enseignants que des parents, on rapprochera la gestion des écoles des besoins. On pourrait aller jusqu’à permettre aux écoles d’exister sur le plan légal, d’engager eux-mêmes les enseignants et les professionnels requis et ainsi faire que cesse les portes-tournantes dans le honteux taux de roulement du personnel dans les écoles publiques du Québec.

Si on ne pense pas bien élever des enfants en multipliant le nombre de parents, on devrait réaliser que de changer constamment le personnel dans une école n’aide absolument pas un milieu à se doter de traditions pédagogiques éprouvées et d’un code de vie stable.

Des écoles publiques autonomes apporteraient beaucoup à notre société.

Les commissions scolaires
Les commissions scolaires se targuent d’être utiles parce qu’elles voient au partage équitable des ressources entre les différents établissements de leurs milieux. Le problème est justement qu’elles décident à la place des écoles (des milieux locaux) ce qui leur est nécessaire pour rendre les services requis. Sur le plan pédagogique en particulier, ce qui est bien pour une école se décide à l’école et dans la classe, en particulier. Chaque commission scolaire possède une direction des services pédagogiques et c’est la première des structures qui devrait disparaître. Laisser aux écoles le leadership pédagogique va de soi. Il est revendiqué – ce leadership – par les associations de direction d’école depuis longtemps et le ministre Bolduc serait avisé de répondre rapidement à cette demande.

Quant aux autres fonctions des commissions scolaires, il devient urgent qu’elles soient au service des écoles et non l’inverse. La paye, le transport, la gestion des immeubles peuvent se faire différemment que dans une structure qui coûte 500 millions de dollars à administrer.

Le vrai défi de Yves Bolduc
Les établissements scolaires en ont assez des changements qui viennent d’en haut et qui leur enlève de la prise sur les décisions qu’ils doivent prendre pour instruire, socialiser et qualifier les élèves du Québec. Si Yves Bolduc veut livrer au gouvernement une réforme qui a du sens, il va redonner de la prise aux milieux locaux et donner aux écoles les moyens de leurs ambitions.

La bureaucratie ne se coupera jamais d’elle-même. (Ajout : voir cette image qui montre la croissance du nombre de cadres vs d’autres catégories de personnel scolaire, sans compter que pendant cette période, le nombre d’élèves a probablement diminué)


Tirée du blogue de Jean Bernatchez – http://gestionscolaire.blogspot.ca – qui tire lui-même cette image de la Revue Liberté #305 – http://www.revueliberte.ca

Si Gaétan Barrette l’a compris, il se peut que l’autre docteur le comprenne aussi.

Capice ?

«À ton tour Yves !»


Crédits caricature : Ygreck

Tags:
0 Commentaires

Laisser une réponse

Contactez-moi

Je tenterai de vous répondre le plus rapidement possible...

En cours d’envoi

Si les propos, opinions et prises de position de ce site peuvent coïncider avec ce que privilégie le parti pour lequel je milite, je certifie en être le seul éditeur. - ©2022 Thème KLEO

Vous connecter avec vos identifiants

ou    

Vous avez oublié vos informations ?

Create Account

Aller à la barre d’outils