Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec et au Journal de Montréal dans la section du blogue des «spin doctors».
Analyser la présente campagne électorale fédérale ces jours-ci est particulièrement difficile. Que pensent les électeurs qui voient les images de ces milliers de réfugiés voulant fuir leur pays déchiré par la guerre et l’oppression? Vers qui se tournent-ils pour espérer traverser les épisodes fréquents de turbulences économiques que les médias couvrent en se demandant sommes-nous en récession ou pas? J’ai souvent l’impression que le message envoyé par les médias est en décalage avec le comportement des électeurs.
Prenons seulement toutes ces questions au sujet de notre capacité d’accueil des réfugiés syriens qui déclenchent au dire des médias une vague de sympathie, partout au Canada.
Le correspondant de ICI Radio-Canada Jean-François Bélanger nous prépare des reportages hallucinants, lui qui accompagne la longue marche de certains migrants dans de bien pénibles conditions qui nous arrachent le coeur. Son canal Twitter, tweet après tweet, nous plonge au coeur de l’action et nous montre à la fois le désarroi de ceux qui fuient et l’accueil chaleureux des Autrichiens et des Allemands qui applaudissent (littéralement) leur arrivé.
Voyez ce reportage…
Des milliers de personnes (majoritairement des Syriens) arrivent ce samedi à Munich en Allemagne et franchement… les images des gestes généreux posés par les citoyens sont très émouvantes.
Au même moment, j’écoute les Coulisses du pouvoir de ce 6 septembre et j’ai vraiment l’impression que tous les commentateurs et analystes tirent tous dans le même sens : le gouvernement conservateur n’en fait pas assez !
Le ministre de l’Immigration affirme vouloir agir plus vite, mais c’est le maintien de la cible des 20 000 sur quatre ans qui semble retenir l’attention.
Faut-il conclure qu’à force de vouloir faire passer Stephen Harper pour « un méchant », certains médias aident peut-être sans le savoir « la cause » conservatrice ?
Le tableau dépeint des politiques conservatrices en matière d’immigration a beau être assez généreux, le message qui reste est que ceux qui gouvernent actuellement ouvrent moins les frontières que les aspirants au pouvoir.
Je recevais via courriel certains chiffres fournis par les responsables de la campagne de M. Harper supportés par des sources gouvernementales : «Le Canada réinstalle 1 réfugié sur 10 dans le monde», ce n’est pas rien.
On me dit que «le Premier ministre Harper a comme cible d’accepter 23,000 réfugiés Irakiens et 11,300 Syriens depuis 2009. De ce nombre, le Canada a relocalisé plus de 22,000 Irakiens et 2,300 Syriens».
Les trois lignes fortes de la politique des conservateurs sont les suivantes…
- Accepter plus de réfugiés et le faire plus rapidement
- Continuer à offrir de l’aide humanitaire
- Continuer notre participation militaire canadienne pour repousser le soi-disant État islamique
Mais le message qui passe au travers des médias est que le Canada n’en fait pas suffisamment.
Ce n’est qu’une anecdote, «un sondage maison [qui] sert uniquement à prendre le pouls de lecteurs du site Web de Canoë et n’a aucune prétention scientifique», mais les résultats à 13h30 cet après-midi laissaient bien peu d’équivoque: on ne préfère pas accueillir plus de réfugiés syriens…
Et si dans le fond, plus les médias poussent pour l’ouverture des frontières et des programmes d’aide aux réfugiés, plus l’électorat (sans le manifester publiquement) trouvait refuge derrière ce qu’il comprend de l’approche de Steven Harper ?
Dans une excellente chronique de mon collègue publié ce matin au Journal, Jonathan Trudeau argumentait qu’une seule photo n’avait suffit pour que nous devenions «tous des Noé, prêts à accueillir la planète entière», sur le coup. Mais peut-être comme il l’écrit notre indignation est-elle plutôt «sélective» et «à géométrie variable» ?
Mon copain sur ce blogue des «spin doctors» écrit que «les jeux sont loin d’être faits» et que «la vraie campagne» peut maintenant commencer.
Le tableau en introduction de son billet est éloquent. Sans les intentions de vote du Québec, le NPD est bon troisième au Canada…
Tout peut encore arriver d’ici le 19 octobre, jour du vote.
Les électeurs sont maintenant davantage réceptifs aux messages des différents partis puisque la rentrée scolaire est chose du passé.
L’accueil des réfugiés a été au coeur de cette cinquième semaine de campagne, mais le sujet pourrait produire des intentions de vote dans les prochaines consultations populaires à l’inverse de ce qu’on pourrait s’attendre, qui sait.
D’ici là, bonne Fête du Travail à tous !
N.B. J’oubliais… Du côté de nos voisins du Sud : “The United States anticipates admitting 1,000 to 1,500 Syrian refugees for permanent resettlement in Fiscal Year 2015 and a somewhat higher number, though still in the low thousands, in FY 2016,” Julia Frifield, the assistant secretary of legislative affairs at the State Department wrote. “Measured against more than four million Syrian refugees currently hosted in the Middle East, our program is a modest but important contribution to the global effort to address the Syrian refugee crisis” (source).
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